Title: 

Podcast: La Coalition pour la Cour pénale internationale marque le 20e anniversaire de l'entrée en vigueur du Statut de Rome

Author: 
Coalition pour la CPI

 

 

 

Transcription

Janet [00:00:00] Bonjour. Vous écoutez Asymetrical Haircuts. Je suis Janet Anderson.

Stephanie [00:00:03] Et je suis Stephanie van den Berg. L’épisode d’aujourd’hui a été réalisé avec le soutien de justiceinfo.net.

Janet [00:00:08] Comme nous l’avions évoqué précédemment, le vingtième anniversaire de la Cour pénale internationale approche à grands pas.

Stephanie [00:00:15] Effectivement, le Statut de Rome, ce bout de papier signé par 60 États entre 1998 et 2002 est entré en vigueur le 1er juillet, il y a tout juste vingt ans.

Janet [00:00:26] Lorsque Brigitte Suhr a commencé à travailler pour la Coalition pour la Cour pénale internationale, peu après l’apparition du Statut de Rome, elle était chargée de convaincre les États de signer et ratifier le traité. Je l’ai retrouvée sur une île tropicale. Vous pouvez entendre les oiseaux en fond sonore. Je lui ai demandé si à l’époque, après que les États aient indiqué leur volonté de soutenir la CPI, on se demandait : Mince, qu’est-ce qu’on va bien faire maintenant ? ou si on se disait plutôt : Super, c’est parti !

Brigitte [00:00:52] Je pense que le sentiment à l’époque était plutôt du type: « Super, allons-y… Mais qu’est-ce qu’il va vraiment se passer ? Cela pourrait prendre des années, qu’est-ce que l’on va bien pouvoir faire ? ». Et la coalition, à travers ses différents membres – internationaux comme nationaux – ont chacun en quelque sorte trouvé leurs propres stratégies, plus ou moins coordonnées par la Coalition. Mais comment allons-nous tirer parti de ce moment pour faire avancer les choses ? C’est ce que nous avons fait. Nous avons travaillé avec nos partenaires nationaux, des alliés nationaux et des représentants gouvernementaux qui étaient intéressés ou potentiellement intéressés. Nous avons aussi identifié une série de pays que nous pensions à même de rejoindre notre cause. Tout cela s’est mis en place assez lentement, avant de vraiment décoller.

Janet [00:01:33] Donc comment expliquer que le fameux nombre soixante, qui était nécessaire au lancement de la CPI, ait été atteint aussi vite ?

Brigitte [00:01:42] Vous savez, il y a certainement de nombreuses raisons pour cela, mais je pense que la dynamique créée autour de Rome a aidé. Vous savez, il y a tellement de pays dans le monde – surtout quand on regarde la liste des États-parties et des premiers États-parties ou des premiers soutiens – énormément de pays avaient vu de sérieux crimes être commis sur leur territoire et se sont battus pendant cinq ou vingt ans pour créer une certaine dynamique judiciaire au niveau national. L’idée que la Cour pouvait pallier les manquements de la justice interne à travers la justice internationale a donc vraiment aidé. Et dans certains cas – je couvrais l’Amérique latine à l’époque – certains des acteurs au pouvoir à l’époque étaient de l’autre coté au moment où ces crimes avaient été commis à l’échelle nationale. Je pense donc que leur convictions philosophiques et personnelles ont permis d’expliquer leur engagement.

Janet [00:02:34] Et donc, face à cet élan de signatures de la part des États, cela n’a pas été trop effrayant de faire face à toutes ces demandes ?

Brigitte [00:02:41] Je pense que c’était au contraire très exaltant. Cela ne m’a pas du tout effrayée. En tout cas pas pour moi, parce que c’était mon travail que de faire en sorte que cela se concrétise, et que les pays acceptent de résoudre des problèmes juridiques, constitutionnels ou politiques, de créer des coalitions aux échelles nationale et internationale, afin de créer une certaine dynamique. Donc pour moi, ce fut au contraire exaltant. C’était certes intimidant, car pour chaque pays que j’ai mentionné et qui a démontré un réel engagement, il y en avait de nombreux autres pour qui ce n’était pas le cas. Et donc, vous savez, c’était toujours la même chose. Faut-il commencer par des cibles faciles et aller de bas en haut ? C’est très bien. Mais il faut aussi viser des cibles plus difficiles lorsque les enjeux moraux ou politiques sont conséquents. Il faut vraiment trouver la bonne stratégie avec ceux qui finiront par rejoindre le mouvement.

Janet [00:03:28] Et ce torrent de signatures s’est finalement mué en ruisseau une fois le travail de la cour entamé. Pourquoi est-ce devenu plus difficile ?

Brigitte [00:03:35] A un moment donné, il ne reste plus que les pays compliqués. Vous savez, les Etats-Unis faisaient campagne contre la ratification, pas uniquement à l’échelle nationale, mais ils cherchaient également à convaincre d’autres pays de ne pas ratifier. Donc c’est devenu un réel problème. Et c’était juste plus difficile, vous savez, quand vous vous référez à des pays comme les Etats-Unis, la Russie ou la Chine et que certains pays utilisent cela comme excuse pour ne pas ratifier. Cela peut devenir un problème lorsque ces pays influents combattent activement la cour, et ne le font pas silencieusement. Mais j’ai arrêté de travailler sur les ratifications en 2014, lorsque l’on en était à 104 ou 114. Je ne me rappelle pas du chiffre exact, mais cela représentait beaucoup de pays à l’échelle mondiale. Il ne restait plus beaucoup de pays qui étaient intéressés ou qui avaient la capacité de ratifier.

Janet [00:04:31] Voilà ce qu’avait à nous dire Brigitte Suhr, qui nous parlait en direct de ses vacances sur une île tropicale, dans un fond sonore incroyable. Revenons un instant sur le dernier point, Steph. C’est assez rare aujourd’hui, n’est-ce-pas, qu’un nouvel État ratifie [le Statut de Rome] ? On a même vu les premiers retraits. Steph, pourriez-vous rapidement faire le point là-dessus ?

Stephanie [00:04:56] Oui bien sûr, je me rappelle par exemple de la dernière fois qu’un nouvel État a signé [le Statut de Rome]. Mais je me rappelle effectivement des menaces de retrait en 2016. Il existait une menace de retrait généralisé de la part de pays africains. Au final, seul le Burundi s’est retiré. Mais l’Afrique du Sud, ainsi que d’autres États africains, avaient également menacé de le faire. Puis, deux ans plus tard, en 2018, les Philippines se sont retirées lorsque la Procureure a commencé à enquêter sur la guerre contre la drogue, ce qui avait fâché le gouvernement philippin.

Janet [00:05:24] A présent, pour parler du vingtième anniversaire, nous avons rassemblé – avec l’aide de la Coalition pour la Cour pénale internationale, où Brigitte travaillait – un groupe de personnes qui fait campagne pour que les États rejoignent [la CPI] mais aussi pour faire en sorte que leurs lois internes permettent de poursuivre efficacement les crimes relevant de la CPI et favorisent la coopération avec la Cour.

Stephanie [00:05:46] Selon les ONG, cet aspect est absolument essentiel pour créer le système du Statut de Rome, pour qu’il y ait un système universel de responsabilité qui implique de mettre fin à l’impunité dans le monde, ou comme les ONG aiment à l’appeler, « boucher le trou de l’impunité ». Nous voulions donc leur demander pourquoi les États adhèrent à la CPI ? Quels sont les avantages pour les États et leurs citoyens? Pourquoi certains États hésitent ? Nous accueillons parmi nous Melissa Verpile, de Parlamentarians for Global Action. Bonjour Melissa.

Melissa [00:06:16] Bonjour.

Stephanie [00:06:17] Nous accueillons également parmi nous Oleksandra Mavtevichuk, du Centre pour les Libertés Civiles en Ukraine, et Aurora Parong de la Coalition Nationale des Philippines pour la CPI.

Oleksandra [00:06:29] Ravie de vous rencontrer.

Aurora [00:06:30] Bonjour.

Stephanie [00:06:32] Commençons par vous, Melissa. Lorsque vous « vendez » la Cour, pour ainsi dire, comment expliquez-vous son universalité ? Est-ce une sorte d’idéal que vous décrivez ?

Melissa [00:06:47] Partant du principe qu’un idéal est intrinsèquement inatteignable, je préfère penser l’universalité du Statut de Rome comme un objectif exigeant que mes collègues de PGA et dans d’autres organisations cherchent à atteindre. Qu’est-ce que cela signifie exactement ? Cela signifie que les États, ou une écrasante majorité d’États, ratifient le Statut, et ce faisant, acceptent la légalité et la nature contraignante du traité. Donc cela signifie encourager les États qui ne sont pas encore des États parties à ratifier le Statut de Rome et élargir la compétence de la Cour. L’universalité rendrait le système plus efficace, améliorerait la légitimité de l’institution et consoliderait l’État de droit aussi bien à l’échelle internationale que nationale, parce qu’aujourd’hui encore des atrocités de masse sont commises à travers le monde et que leurs auteurs restent impunis. Il est donc nécessaire d’apporter justice aux victimes, de renforcer le système judiciaire international, et la responsabilité face aux crimes internationaux, mais aussi de prévenir la répétition de ces crimes. Voici les principaux objectifs du système du Statut de Rome. La justice est un instrument fondamental pour construire des sociétés pacifiques et inclusives, dans lesquelles les droits humains ne sont pas ignorés mais réalisés. La Cour compte actuellement 123 États parties, mais de nombreux États demeurent en dehors de ce système de responsabilité. Nous travaillons donc avec nos membres, y compris dans des États non-parties tels que la Jamaïque, la Guinée-Bissau, et même l’Ukraine, pour les encourager à ratifier le Statut de Rome.

Janet [00:08:38] J’entends votre discours, Melissa. Je vois ce que vous voulez dire, que tout cela est très important à une échelle globale. Mais pourriez-vous nous expliquer plus précisément quelles sont les implications pour un État lorsqu’il signe le statut ? Stephanie a déjà un peu décrit le système du Statut de Rome. Mais vous travaillez à une échelle nationale. Que se passe-t-il au niveau du droit interne ?

Melissa [00:09:09] Eh bien, pour le droit interne, cela dépend vraiment du pays. Il faut donc tout d’abord générer une certaine volonté politique. Les parlementaires sont une pièce-clé du rouage. Ils doivent essentiellement se mettre d’accord avec leurs collègues du Parlement pour ratifier le Statut de Rome. Une fois que cela est fait, ils deviennent des États-parties et doivent intégrer les provisions du Statut de Rome dans leur droit interne, afin de l'incorporer à une échelle nationale. Et parce que tout cela est basé sur un principe de complémentarité, les États ont la principale compétence en matière d’enquêtes et des poursuites des crimes internationaux. La compétence de la Cour est donc complémentaire à celle des États. Par conséquent, les États sont réellement les acteurs principaux, et leurs lois entrent dans l’équation avec les provisions du Statut de Rome afin qu’ils puissent mener la procédure. A moins qu’ils soient peu enclins ou incapables de le faire, et dans ce cas, la Cour intervient. Mais les États restent les principaux acteurs responsables de la poursuite des crimes internationaux.

Stephanie [00:10:10] Oleksandra, vous venez d’un pays avec un passé compliqué en ce qui concerne l’adhésion à la CPI. L’Ukraine a signé le traité, mais ne l’a pas encore ratifié. Elle a cependant délégué le pouvoir d’enquêter à la Cour, résultant en une enquête actuellement très médiatisée de la CPI en Ukraine. Comment expliquer ces allers-retours entre signature et ratification ? Comment en sommes-nous arrivés là ?

Oleksandra [00:10:36] La question de la ratification du Statut de Rome de la Cour pénale internationale n’est pas théorique mais est en réalité très concrète, car nous faisons actuellement face à une invasion russe de grande ampleur en Ukraine et que nous observons un nombre important de crimes internationaux commis par les troupes russes. La Russie utilise simplement les crimes de guerre comme méthode de combat. Et ces actes ne sont aucunement justifiés d’un point de vue militaire. Nous documentons des attaques délibérées contre des civils et des infrastructures civiles essentielles, l’usage de boucliers humains, des viols et autres violences liées au genre, des meurtres délibérés, des cas de torture et de mauvais traitement, de disparitions forcées, etc. Mais cette guerre n’a pas commencé en février de cette année mais bel et bien en 2014. Les forces de l’ordre et le système judiciaire ukrainiens – qui sont mal préparés – ont désormais la responsabilité de lutter contre l’impunité dans le cadre de ce conflit armé. Et depuis tout ce temps, en tant qu’organisation de défense des droits humains, nous cherchons à promouvoir la ratification du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il s’agit d’une obligation internationale de l’Ukraine au regard de l’Article 8 de l’Accord d’Association avec l’UE. Mais cela n’est pas nécessaire juste pour l’UE, mais bel et bien pour la population ukrainienne en tant que telle. La ratification avait précédemment été freinée par un report de trois ans, lié à l’entrée en vigueur d’un amendement à la constitution ukrainienne. Ce délai est expiré depuis juin 2019, mais le Parlement ukrainien n’a toujours pas déposé de projet de loi de ratification. Dès lors, nous continuons à encourager les autorités ukrainiennes à le faire.

Janet [00:12:18] J’entends votre déception. J’imagine qu’ils ne l’ont toujours pas fait. Et Melissa nous a fait comprendre à quel point les parlementaires jouaient un rôle crucial dans ce processus. Comment se fait-il que le Parlement n’ait pas profité des six derniers mois pour le faire ? Qu’est-ce qui explique encore ce blocage selon vous? 

Oleksandra [00:12:43] C’est une excellente question parce que pour le moment, nous nous trouvons dans une situation très particulière, voire étrange, parce que l’Ukraine n’est toujours pas un État-partie au Statut de Rome. Cependant, le 2 mars 2022, le Procureur a annoncé le lancement d’une enquête portant sur la situation en Ukraine se basant sur deux déclarations issues du gouvernement ukrainien, datant de 2014 et de 2015. Cela fait donc des années que nous alertons les autorités ukrainiennes parce que, d’une part, l’Ukraine a l’obligation de coopérer avec la Cour pénale internationale sur la base de ces deux déclarations mais, d’autre part, l’Ukraine ne dispose pas des droits habituellement réservés aux États parties du Statut de Rome. Et lorsque l’on en discute avec des parlementaires ukrainiens, on n’obtient jamais de réponse claire pour expliquer la situation et le fait que l’on n’ait pas encore ratifié le Statut de Rome. 

Janet [00:13:55] Je voudrais demander à Melissa de commenter sur deux choses qui sont liées parce que vous avez mentionné avoir travaillé avec des parlementaires. Je ne veux pas que le podcast entier porte sur l’Ukraine, mais c’est vraiment intéressant. Melissa, quels sont vos retours sur l’Ukraine ? Pourquoi les parlementaires peinent encore à se pencher sur ça ? Sont-ils tout simplement distraits par l’ampleur des choses qui s’y passent ?

Melissa [00:14:12] Eh bien, j’ai les mêmes informations qu’Oleksandra. Nous travaillons étroitement avec le Centre pour les Libertés Civiles et nos membres. Il y a beaucoup d’incompréhension car il y aurait un blocage et le président ukrainien – disons l’armée – reçoit des informations contradictoires sur le Statut de Rome. Et nous pensons – et la plupart de nos membres œuvrent pour cela – qu’il serait extrêmement bénéfique que l’Ukraine ratifie le Statut de Rome et que cela n’entrerait pas en conflit avec la compétence actuelle de la Cour concernant l’enquête ouverte récemment.

Oleksandra [00:14:56] Je rajouterais juste quelque chose là-dessus, car durant les huit années durant lesquelles nous avons promu la ratification du Statut de Rome, nous avons entendu un argument récurrent d’importance pour le Parlement ukrainien. Les parlementaires ukrainiens craignent en effet que la Russie utilise la Cour pénale internationale comme un instrument contre l’Ukraine. D’après eux, la Russie va falsifier des affaires criminelles et envoyer ces fausses informations à la CPI. L’enjeu ne serait donc pas de protéger les citoyens ukrainiens mais de combattre la propagande russe au sein de la Cour pénale internationale. Nous leur expliquons alors que la Cour pénale internationale n’est pas fragmentée, qu’elle mène ses propres enquêtes et que toute crainte à ce propos est infondée. Mais à cause d’une certaine incompréhension autour de la Cour pénale internationale durant toutes ces années, cette idée s’est développée parmi certains parlementaires ukrainiens.

Stephanie [00:16:04] Cela marque la fin de notre parenthèse sur la situation en Ukraine. Nous nous tournons désormais vers les Philippines et vers Aurora, qui est confrontée à une toute autre situation, car le gouvernement est fermement opposé à la Cour. Les Philippines se sont retirées, comme nous l’avons évoqué précédemment, mais une enquête concernant certains crimes se poursuit – bien qu’elle soit actuellement suspendue, le gouvernement ayant demandé un report le temps qu’il enquête lui-même sur l’affaire en question. Pendant un certain temps, les Philippines avaient également leur propre juge élu à la Cour. A Manille, on observe donc en quelque sorte deux tendances : une opposition, mais également une coopération avec la Cour. Aurora, comment la Cour est-elle perçue à Manille ? Comment est-ce que le Parlement y réagit ?

Aurora [00:16:50] Aux Philippines, nous avons des perspectives très variées sur la procédure, la justice et la responsabilité. Ce qui explique cela. Les valeurs, aussi : comment respecter les droits humains ou le droit international humanitaire ? Nous avons donc dû faire campagne pour la ratification du statut de Rome pendant plus de dix ans. Nous avons dû expliquer le principe de complémentarité, les rapports entre la compétence universelle de la Cour et la souveraineté, car certains craignaient que l’universalité compromette la souveraineté et l’indépendance du pays. Vous savez, c’est un problème pour eux. Mais bien entendu, lorsque l’on est confronté à des dirigeants politiques ou des acteurs du Sénat – notre organe législatif – impliqués dans le processus de ratification, ils estiment effectivement qu’il est important d’avoir des solutions. Qu’il est important d’avoir des mécanismes de responsabilité, et de reconnaitre que dans certains cas, la responsabilité ou la justice ne peuvent être garanties à l’échelle du pays. Et c’est pourquoi il est important d’avoir une cour de dernier recours, en l’occurrence la CPI. Et donc nous l’avons ratifié, nous avions même adopté un cadre législatif, puis élu un juge. Mais lorsque des dirigeants en place ont formé un nouveau gouvernement hostile aux droits humains et craignant de faire l’objet d’une enquête et de poursuites de la part de la CPI, ils se sont évidemment opposés à reconnaitre la compétence de la CPI. Les Philippines se sont alors retirées. Mais le fait que l’examen par la procureure Fatou [Bensouda] ait débuté avant le retrait des Philippines signifie que la Cour conserve sa compétence sur certaines affaires datant de lorsque les Philippines étaient encore parties à la Cour.

Janet [00:18:43] Je comprends que vous regardiez ça à travers un prisme national, Aurora, car vous avez les élections et les objections de vos dirigeants politiques nationaux. Si je peux me permettre, de mon point de vue, le retrait des Philippines est arrivé quasiment au même moment où les Etats-Unis mettaient une pression énorme sur la Cour, avec des sanctions émises par l’administration Trump. Il y avait aussi toutes ces critiques sur la Cour l’accusant de se concentrer essentiellement sur le continent africain – alors que l’on sait que les pays africains figuraient en réalité parmi les premiers soutiens de la Cour. Le Sénégal a été l’un des premiers pays à ratifier le Statut de Rome. Je me demandais donc, qu’est-ce que les Philippines avaient en tête ? Se voyaient-elles davantage participer à un retrait en masse, qui ne s’est finalement jamais matérialisé, ou s’agissait-il simplement d’une affaire de politique interne ?

Aurora [00:19:54] Il s’agit essentiellement de politique interne, parce qu’après la ratification, on n’a jamais parlé de la CPI comme d’un problème. Le Président Duterte est ensuite arrivé au pouvoir en 2016, débutant la guerre contre la drogue qui a résulté en des dizaines de milliers d’assassinats, en toute impunité. Il y a une affaire seulement où des policiers ont été condamnés, des problèmes de violation de protocoles d’enquête ont également été signalés. Il peut donc y avoir d’autres enquêtes, mais il n’y a eu aucun réel progrès. À part pour la première affaire, il n’y a rien eu de plus. La société civile a donc principalement aidé les familles des victimes à déposer leurs dossiers auprès de la CPI. Voilà comment cela s’est passé en somme.

Stephanie [00:20:51] Tant que nous sommes sur le sujet des Etats-Unis faisant pression pour le retrait ou le fait de ne pas signer, Oleksandra, plusieurs diplomates nous ont dit que sous l’administration Trump, les Etats-Unis avaient fortement insisté pour que l’Ukraine ne ratifie pas le Statut. Cela explique-t-il également pourquoi la ratification a été ralentie, ou pensez-vous que c’est davantage une question de politique interne, ou une crainte de la part de l’armée ukrainienne concernant les implications d’une adhésion à la CPI ?

Oleksandra [00:21:20] Je pense que le délai de ratification du Statut de Rome s’explique principalement par la mauvaise compréhension de la nature de la Cour pénale internationale. Quoi qu’il en soit, nous devons y remédier le plus rapidement possible, car comme je l’ai évoqué, nous avons des responsabilités à l’égard de la Cour pénale internationale, sans pour autant bénéficier des droits qui incombent aux États parties du Statut de Rome. D’autre part, la population ukrainienne attend beaucoup de la Cour pénale internationale. Nous nous retrouvons désormais dans une terrible situation, où les Nations Unies n’ont pas pu contribuer à la libération d’une seule personne en détention.

Stephanie [00:22:08] Ce que nous comprenons en vous écoutant, Aurora et Oleksandra, c’est que la CPI s’appréhende souvent à travers un angle national. Je me demandais, très concrètement, à quel point est-il difficile d’obtenir une ratification ? Quelle est l’ampleur du processus de ratification à l’échelle nationale ? Combien d’années cela prend-il généralement ? Nous donnerons d’abord la parole à Melissa, puis à Aurora qui est passée par là, et à Oleksandra, pour qui le processus de ratification est en cours.

Melissa [00:22:36] C’est une excellente question. Cela peut prendre très longtemps, cela peut prendre des années. Par exemple, en Amérique latine, nous avons quasiment atteint l’universalité, mais cela n’a pas été facile. Cela a pris des années. Ces processus prennent des années car il faut générer une volonté politique, il faut renforcer les connaissances à propos de la Cour, que ce soit au niveau du Parlement mais aussi au sein de l’exécutif, voire du pouvoir judiciaire, car au final, c’est eux qui appliqueront le Statut de Rome à l’échelle nationale. Il s’agit donc d’un long processus, à penser comme une succession d’étapes. Et en cas d’élections par exemple – vous pouvez travailler avec un parlement pour plusieurs années, avoir obtenu des soutiens, compter sur des législateurs qui proposent des lois, des modifications du Code pénal, de la Procédure pénale, du Code de Procédure pénale. En cas d’élections, ce groupe de législateurs qui porte le projet peuvent perdre leur place de députés ou ne pas être rééligibles. Le processus doit alors recommencer. Il s’agit donc vraiment de sensibiliser le plus grand nombre et de s’assurer d’une bonne compréhension du système du Statut de Rome et de son application en droit interne.

Stephanie [00:23:53] Aurora, que diriez-vous de la durée du processus, ou de l’ampleur des efforts d’organisation?

Aurora [00:24:00] Nous avons d’abord dû demander au président de signer puis cela aurait dû être envoyé au Sénat pour être ratifié, et cela aurait dû s’en arrêter là. Mais ce qu’il s’est passé ce qu’un président l’a signé. Puis il y a eu un changement de gouvernement et à ce moment-là, le nouveau président n’a pas envoyé le texte au Sénat. C’est resté à l’arrière-plan. Nous avons même dû aller à la Cour suprême pour le réclamer, mais nous avons perdu. Bref, nous avons finalement eu un nouveau président qui pensait qu’il était très important de franchir le pas. Et les sénateurs étaient déjà prêts à ratifier. Et quand le texte a été signé par le président, Président Aquino, ils étaient prêts. Une autre chose vraiment très importante à ce moment est que les crimes d’agression sont tombés sous la compétence de la Cour, et que nous avions alors un problème entre la Chine et les Philippines. Nous avons alors pensé que cela pouvait s’avérer bénéfique pour les Philippines. D’où la ratification. Mais après la ratification, on a eu un président qui a lancé la guerre contre la drogue, qui a causé une multitude d’assassinats, potentiellement des crimes contre l’humanité, et qui craignait être poursuivi par la Cour. Et donc il n’en a plus voulu. D’où le retrait. Cela faisait plus de dix ans que nous informions les gens et faisions campagne. En réalité, le travail de la coalition a débuté au moment des élections, lorsque la Cour n’était pas encore sur pied. Il y avait déjà eu la conférence de Rome, mais la Cour n’existait pas encore. Depuis le retrait, il y a eu des efforts délibérés pour contourner la Cour en créant un comité d’examen qui, deux ans plus tard, n’a pas apporté grand-chose en matière d’enquête. Les organisations de la société civile et les victimes doivent vraiment travailler dur pour que l’on continue à en parler. Puis les élections sont arrivées. Certains candidats auraient pu changer le cours des évènements, mais ils ont finalement perdu. On se retrouve donc face à un président fils de dictateur, qui ne reconnait pas les violations des droits humains et qui impose la loi martiale, et une nouvelle vice-présidente qui est la fille du président sortant, lequel craint les poursuites. On en est donc toujours au même point, même si les assassinats perdurent et que les familles des victimes continuent à être harcelées. La plupart des membres de la coalition travaillent directement avec les familles des victimes et certains survivants.

Stephanie [00:27:20] Voici un rappel de la situation aux Philippines qui donne à réfléchir. Revenons brièvement sur l’Ukraine : où se situe le processus actuellement ? Le Statut a été signé mais a besoin d’être ratifié. Quelle est donc la prochaine étape ? Que le président soumette le texte au Parlement ? Concrètement, quelles sont les étapes de la ratification en Ukraine ?

Oleksandra [00:27:48] Le président doit soumettre l’instrument de ratification au Parlement, ce qui n’a toujours pas été fait. Et en tant qu’organisation des droits humains, nous appelons publiquement à ce que cela soit fait. Mais je voudrais également souligner les efforts positifs réalisés par les autorités ukrainiennes depuis l’invasion russe. Quel que soit l’état du processus de ratification, les autorités ukrainiennes ont entamé une collaboration avec la Cour pénale internationale. Et le mois dernier, le Parlement ukrainien a voté une loi régulant la procédure de coopération avec la Cour pénale internationale. D’autre part, l’Ukraine, d’autres pays et la Cour pénale internationale collaborent au sein de l’Équipe Commune d’Enquête, et récoltent des preuves de crimes internationaux commis dans le cadre de cette guerre. Il y a également d’intenses collaborations entre le Bureau du Procureur général et le groupe de travail de la Cour pénale internationale qui a été envoyé sur place pour mener une enquête indépendante et impartiale. Nous continuons donc à demander au Président d’introduire un projet de loi sur la ratification du statut aussi rapidement que possible. Mais c’est déjà une bonne chose qu’en pratique les autorités ukrainiennes soient disposées à établir une coopération fructueuse.

Janet [00:29:29] Je voulais vous demander à toutes si cet accent sur la CPI – et je sais que c’est l’objet de ce podcast, la CPI et le processus de ratification. Je veux dire, est-ce la seule chose sur laquelle vous travaillez vraiment ou est-ce que vous vous voyez faire partie d’un mouvement plus large ? Je veux dire, il existe d’autres possibilités en matière de justice transitionnelle. Il y a d’autres mécanismes de justice universelle à travers le monde. Considérez-vous travailler également sur ces aspects, ou la CPI constitue-t-elle le réel cœur de votre travail ? Melissa?

Melissa [00:30:05] Eh bien, au sein de PGA, bien sûr, nous soutenons tous les mécanismes de responsabilité parce que ce qui compte c’est d’apporter justice aux victimes. Mais nous estimons que parce que la CPI est l’unique cour permanente indépendante avec la capacite spécifique d’enquêter et de poursuivre des crimes au sein du système du Statut de Rome, lesquels sont des crimes internationaux assez complexes, elle doit être renforcée. Et par exemple, il y a eu des discussions sur la mise en place de tribunaux spéciaux. Bien entendu, s’il n’est pas possible de fonctionner à travers la CPI, nous saluons tout effort, nous saluons tout mécanisme de justice. Mais nous estimons que le fait de se concentrer sur la CPI est une mesure très importante. Il n’est pas bon de disperser les efforts, à moins que cela soit absolument nécessaire.

Janet [00:31:01] Oleksandra, vous avez mentionné d’autres pays impliqués dans l’équipe d’enquête commune, et nous savons à quel point votre Procureur général est actif. La CPI est-elle le seul objectif, le seul enjeu, ou soutenez-vous une vision plus large ?

Oleksandra [00:31:19] Oui, je précise encore que nous faisons face à un nombre de crimes impressionnant et que depuis le 24 février, plus de 15,000 enquêtes criminelles ont déjà été ouvertes. C’est énorme. La question est de savoir comment rendre justice à l’ensemble des victimes de ces 15,000 affaires. Nous savons que selon la procédure, la Cour pénale internationale se focalise sur les principaux dirigeants politiques et militaires. La Cour pénale internationale ne pourra donc pas couvrir ces milliers d’affaires, mais va se contenter d’en sélectionner certaines. Cela signifie qu’il revient aux Ukrainiens d’amener les responsables de ces crimes face à la justice. Et là encore, au vu de la quantité de crimes commis, même le système juridique le plus performant du monde aurait du mal à y faire face. C’est donc pour cela que nous essayons de penser à une manière de créer un mécanisme efficace, en plus de la Cour pénale internationale, qui apporterait un élément international au niveau des enquêtes et de la justice nationale. Il faudrait probablement créer une cour internationale hybride qui couvrira toutes les affaires qui n’auront pas été sélectionnées par la Cour pénale internationale.

Janet [00:32:05] Aurora, le leadership politique est certainement différent aux Philippines. Mais imaginons que la CPI, du fait de la composition du Sénat par exemple, ne soit pas une solution. Pouvez-vous imaginer un mécanisme de responsabilité différent ? Auriez-vous dans ce cas également un rôle à jouer, où pensez-vous que la CPI soit réellement l’unique voie de recours ?

Aurora [00:33:18] Nous pensons que la CPI est très importante pour garantir une entière responsabilité, surtout depuis que le président bénéficie d’immunité en cas de poursuite. Nous avons cependant tenté la voie du Conseil des Droits Humains des Nations Unies pour enquêter sur la situation. Mais les Philippines ont réussi à contourner cela en créant le comité d’examen que j’évoquais plus tôt. Cependant, pour certaines affaires, nous avons parfois réussi à mobiliser le droit américain de la responsabilité civile pour obtenir des compensations lorsque le dictateur se trouvait aux Etats-Unis. Cela pourrait donc être une voie de recours si le président sortant s’y rendait. Nous avons également eu aux Philippines des mécanismes de justice transitionnelle. J’ai moi-même fait partie d’un organisme quasi-judiciaire qui examinait les graves violations des droits humains sous la loi martiale. Nous avions alors pu reconnaitre des milliers de victimes et obtenir des réparations pour elles, issues des sommes mal acquises, volées par le dictateur au pouvoir. Donc voici des choses auxquelles nous pensons encore. Nous essayons également de voir si le droit interne peut s’attaquer à des crimes similaires à ceux poursuivis par la CPI mais ne relevant pas de sa compétence car commis après le retrait.

En effet, comme l’a remarqué Oleksandra, tout le monde n’aura pas la possibilité d’être couvert par une enquête de la CPI. Il reste donc des efforts à faire pour porter des affaires devant les tribunaux locaux. Et bien évidemment du fait du retrait, la coalition continue à faire de la sensibilisation aux droits humains, en espérant que si un nouveau gouvernement arrive au pouvoir, et que ce dernier possède toutes les qualités et valeurs nécessaires pour reconnaitre sa responsabilité en matière de droits humains, nous serons alors prêts. Il s’agit donc dès à présent de construire des coalitions.

Stephanie [00:35:46] Et si nous faisons un pas en arrière et regardons la Cour dans son ensemble, il est très peu probable que de grands pays, tels que les Etats-Unis, la Russie, la Chine ou encore l’Inde, signent le traité – même s’il ne faut jamais dire jamais ! Qu’en pensez-vous ? Pensez-vous toutes les trois que la Cour aura toujours vocation à demeurer une Cour pour les pays de petite ou moyenne taille ? Quel genre d’arguments utilisez-vous pour contredire cette idée lorsque vous faites campagne pour la ratification du Statut de Rome ? Est-ce que cela permet de faire face aux tentatives d’intimidation ? Est-ce l’objectif de la Coalition pour la Cour pénale internationale d’avoir une CPI universelle ? Est-ce que cet objectif compte encore après tout ce temps ?

Aurora [00:46:30] Oui, vous pouvez dire que je suis optimiste. Et ce malgré mon âge. Nous avons besoin d’espoir pour continuer le travail que nous avons entamé. Donc je pense que l’objectif d’universalité de la Cour est difficile à atteindre mais que nous devons continuer à convaincre les États à ratifier le statut et à devenir des États parties. Je pense que nous devons faire davantage de travail de sensibilisation, et pas uniquement avec les gouvernements, parce que ces grands pays sont très hostiles à la CPI. Nous devrions donc peut-être mobiliser les citoyens de ces pays et construire une certaine solidarité internationale, et insister sur le fait que nous avons tous signé les déclarations et conventions de l’ONU et les Conventions de Genève qui parlent de non-discrimination et qu’à ce titre il doit y avoir une cour universelle dont l’accès serait lui aussi universel. Nous espérons donc que les citoyens peuvent à un moment mettre la pression sur leurs dirigeants. Et si les citoyens sont effectivement prêts, et que les dirigeants politiques sont disposés à le faire, alors cela pourrait se matérialiser. Peut-être pas de mon vivant, mais je continue à espérer.

Stephanie [00:38:03] Oleksandra, êtes-vous encore optimiste? Évidemment, dans le cas de l’Ukraine, le problème est que la Russie n’est pas un État partie. Cela vaut-il quand même le coup d’essayer?

Oleksandra [00:38:18] Je pense sincèrement qu’à un moment donné l’Ukraine va ratifier le Statut de Rome. Je n’en ai aucun doute. Nous sommes sur la bonne voie. Nous avons envoyé une déclaration à la Cour pénale internationale et celle-ci a déjà entamé une enquête. Les autorités ukrainiennes ont déjà commencé à collaborer étroitement avec la Cour pénale internationale. Donc nous sommes sur la bonne voie et devons juste continuer à pousser nos dirigeants à finaliser la ratification. Et c’est important car nous avons besoin de cette cour universelle. C’est quelque chose que j’ai appris sur le terrain. J’ai personnellement récolté les témoignages de centaines de victimes de crimes de guerre qui ont toutes vécu des choses terribles. Ils ont véritablement besoin de justice. En tant que défenseurs des droits humains, que pays, que communauté internationale, nous avons une responsabilité immense, celle d’apporter justice aux victimes. Parce que les personnes victimes de crimes de guerre et d’autres types de crimes internationaux n’ont pas juste besoin de réparer les infrastructures détruites et de réunifier leurs familles, elles ont aussi besoin de croire à nouveau en la justice, même quand celle-ci est différée.

Stephanie [00:39:39] Melissa, que répondez-vous lorsqu’un parlementaire d’un plus petit pays vous dit par exemple : « Les Etats-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde ne sont pas membres, donc pourquoi devrions-nous jouer les moralisateurs et rejoindre cette initiative alors que les gros joueurs ne jouent pas le jeu ? »

Melissa [00:46:15] Oui, je leur réponds que c’est une décision souveraine de leur État, et qu’il faut considérer tous les bénéfices qui accompagnent le fait d’être État partie, comme le fait de participer à un cadre de solidarité internationale et de bénéficier d’un cadre qui permet de renforcer leur propre droit interne et les capacités de leurs acteurs judiciaires et de leurs procureurs, de tout leur système judiciaire, dans un cadre international, en collaboration avec d’autres États. Je pense qu’ils ont tout à gagner et qu’ils n'ont pas à regarder ce que font les Etats-Unis, la Chine ou la Russie. Ils n’ont pas à servir de modèles. D’autre part, on a vu les Etats-Unis progresser, en fonction de l’administration. Il existe désormais une loi bipartisane, du fait de la dynamique créée par l’agression de l’Ukraine par la Russie. L’ambassadeur pour la justice pénale globale a même mentionné que l’une des principales priorités pour l’administration Biden-Harris était de contribuer au système de justice internationale et de soutenir, d’assister et d’identifier des domaines permettant d’aider la CPI à réussir et à accompagner ses efforts en matière de responsabilité. Je pense donc que les États devraient vraiment s’intéresser à ce qui est bon pour leurs propres systèmes internes et leurs populations, avant de se soucier de ce que font leurs voisins. La justice internationale est quelque chose que nous devons réellement préserver et chercher à atteindre parce qu’il y a de réels avantages à être membre du système du Statut de Rome.

Stephanie [00:41:44] Merci infiniment à toutes d’avoir contribué à cette discussion, nous approchons désormais la fin de notre podcast. Nous avons pour habitude de poser certaines questions « Asymetrical Haircuts ». Comme vous êtes nombreuses, je vais vous les poser de manière assez aléatoire. Nous avons deux questions. Je vais vous en proposer deux et vous pourrez choisir à laquelle vous souhaitez répondre. La première : « avez-vous une affaire préférée, que vous appréciez particulièrement ou qui s’est avérée formatrice dans votre parcours ? ». La seconde : « qu’est-ce que vous regardez, lisez ou écoutez et que vous aimeriez nous recommander ? ». Vous pouvez choisir de répondre à l’une des questions, ou aux deux bien entendu, si vous avez une affaire favorite et que vous écoutez aussi de super podcasts. Comme ça vous aurez un peu de flexibilité dans vos réponses. Je vois Aurora sourire, je vais donc lui donner la parole en premier.

Aurora [00:43:06] Vous savez, je pense à l’Afghanistan et au Myanmar/Bangladesh. L’Afghanistan parce que les troupes américaines devaient initialement faire l’objet d’une enquête. Le Bangladesh parce qu’il s’agit de ma région, dans laquelle nous n’avons pas de bureau de la CPI dans la région, la région Asie-Pacifique, et parce que nous essayons d’œuvrer pour que ces affaires progressent.

Stephanie [00:43:31] Donc vos affaires de la CPI préférées sont l’Afghanistan et le Myanmar. Melissa, voulez-vous nous donner votre affaire préférée, ou nous recommander quelque chose à lire, regarder ou écouter ?

Melissa [00:43:32] Je lis actuellement « Why We’re Polarised » d’Ezra Klein, et c’est un livre très intéressant car il parle beaucoup du revirement démocratique et des raisons pour lesquelles on n’arrive plus à se parler en société de manière générale. Je pense que cela a un impact sur le multilatéralisme et sur les crimes violents. Et donc c’est intéressant de lire cela. Bien que le livre soit lié au contexte américain, je pense que ces réflexions s’appliquent dans le reste du monde.

Stephanie [00:44:30] Et pour finir, Oleksandra.

Oleksandra [00:44:45] ll est très important de se référer aux expériences passées parce que nous nous reposons tous sur cette base. Mais peut-être que je nous encouragerais à créer l’affaire la plus intéressante, ensemble. Nous travaillons là-dessus maintenant parce que nous n’avons pas à prédire l’avenir. Nous devons créer l’avenir que nous souhaitons. Et je souhaite un futur qui soit marqué par la justice.

Janet [00:44:33] Un grand merci à toutes pour votre participation aujourd’hui. Avant de conclure, je veux passer un dernier enregistrement de Brigitte Suhr. Pourquoi ? Parce qu’on entend un combat de coqs. Non, ce n’est pas la vraie raison. La vraie raison c’est que cet extrait nous aide à résumer les contributions de la Coalition pour la Cour pénale internationale – nos partenaires pour ce podcast – au cours de ces vingt dernières années. J’ai donc fini par lui demander si elle était fière du chemin parcouru.

Brigitte [00:51:56] Je suis fière de ce que j’ai réussi à faire. Je suis fière de la coalition que nous avons construite. Je suis fière du partenariat entre les ONG internationales et nationales et comment cela permet de progresser, de plein de façons différentes. Cela fait progresser les cours régionales, les commissions, la justice, et à une échelle nationale, des réformes juridiques et un renforcement des capacités. Cela permet un tas d’avancées différentes et j’en suis vraiment fière. 

Janet [00:45:22] Sur ces derniers mots de Brigitte, en direct de son Île tropicale, je voudrais toutes vous remercier, en espérant vous voir à la Haye à l’occasion, Oleksandra, Aurora et Melissa. Au revoir !

Melissa, Oleksandra, Aurora [00:45:45] Ravie de vous avoir rencontrée. Merci. Au revoir.

Stephanie [00:45:50] Merci. Au revoir.